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Enseigner, former et informer à partir de textes scientifiques du passé : questions heuristiques et méthodologiques

Mercredi 9 mars 2016


Université Paris Diderot, salle des thèses, 575F, bât. Halle aux Farines
9:00 – 17:00


Organisation : Sophie Canac (LDAR), Cécile de Hosson (LDAR), Christine Proust (CNRS, SPHERE & ERC SAW) et Charlotte de Varent (Univ. Paris Diderot, SPHERE & ERC SAW)




Les conférences rendront compte de travaux de recherche engageant l’étude de textes anciens et montreront comment ceux-ci peuvent modeler l’enseignement, la diffusion et/ou la formation des enseignants de sciences. Les intervenant sont invités à préciser :

  • les formes (de l’inclusion forte : le texte tel quel, à l’exclusion : le texte sert la conception mais n’est pas présenté aux élèves, aux étudiants, au grand public)
  • les buts (donner à voir la sciences telle qu’elle se fait, viser une compréhension plus robuste d’un concept donné, éclairer des difficultés, etc.)
  • les moyens (quelles transformations apporter éventuellement aux sources anciennes pour les rendre accessibles à un public donné ? Quels bénéfices tirer des études en didactique de l’histoire pour concevoir l’utilisation des textes historiques en classe ?)

Au-delà du dialogue entre enseignement et textes anciens, les conférences pourront également montrer que les fondements de l’épistémologie moderne peuvent aussi contribuer à alimenter les débats sur l’enseignement des sciences.



Pré-programme
  • 9:00 Accueil
  • 9:15 – 10:00 Jean-Jacques Szczeciniarz (Université Paris Diderot, SPHERE)
    Apprendre avec Copernic.
    Je voudrais montrer comment et en quoi la restitution de la pensée scientifique de Copernic avec ses hésitations, ses difficultés, recouvertes par le résultat final repris par ses successeurs parmi les plus grands Kepler et Galilée, nous enseigne sur ce que peut être un processus scientifique et son établissement. Elle nous enseigne également sur la façon dont nous pouvons transmettre les connaissances, ici géométriques, astronomiques observationnelles, physiques. Je m’attacherai à lire le livre I, celui que "tout le monde a lu", en regard de certains passages plus difficiles, même si le livre I est loin d’être trivial. Et si j’en ai le temps, je parlerai des arguments de Kepler et j’en choisirai un chez Galilée, en faveur du système de Copernic.
  • 10:00 – 10:45 Patricia Crépin-Obert (LDAR, Université Paris Est-Créteil)
    De l’histoire de la paléontologie pour enseigner et (se) former en sciences de la vie et de la Terre.
    l’etude des manuels scolaires "scientifiques" a constitué le fil directeur de mes travaux de recherche doctorale. La question de recherche centrale est fondée en épistémologie des sciences sur cette pratique sociale de référence et sa transposition en classe de sciences : quelles raisons sont entrées en conflit dans les différentes communautés discursives à propos des fossiles ? En parallèle des séquences menées en classe, la méthodologie en histoire des sciences s’est focalisée sur la recherche de sources primaires permettant d’identifier des points de convergence entre des obstacles épistémologiques et les constructions de problèmes en tension. Des sciences de la nature à la nature de la science, l’histoire des sciences permet un certain éclairage des objets controversés à la lumière des arguments mobilisés par des protagonistes. Des beaux moments de découverte ou de traduction de sources inédites puis d’analyse de sources primaires ont été vécus, qui nous ont permis de réaliser la nature de la science en train de se construire : des textes fondateurs alliant la beauté d’une démonstration et le plaisir du raisonnement scientifique bien mené ; mais aussi des échantillons historiques tombés dans l’oubli car porteurs d’obstacles tels l’animisme, l’artificialisme ou l’analogisme. Nous avons redonné vie à des "perdants" de la science sur la nature des fossiles, leur origine ou leur rapport avec les vivants actuels : au xviie siècle le dialogue galiléen de Du Hamel écrit en latin, au xviiie siècle les échanges épistolaires de Voltaire et La Sauvagère qui nient l’origine naturelle des fossiles défendue par Guettard, au xixe siècle des séances hebdomadaires à l’Académie des sciences à propos d’une mâchoire énigmatique de vertébré qui marquent un conflit entre De Blainville et Geoffroy-saint-Hilaire. La fonction de l’histoire des sciences, maintenue ici en dehors de la classe, est double, épistémologique et didactique. Pour le chercheur, l’enquête historique mène à une grille d’analyse des processus de raisonnement erronés ou validés actuellement, retrouvant les spécificités du savoir scientifique. Pour la formation des enseignants, les perspectives sont riches d’une appétence à l’histoire des sciences qui va à l’encontre d’un a priori fréquent d’un passé dépassé. Et d’une façon qui peut paraître paradoxale l’usage de l’histoire des sciences valorise la place de l’erreur dans la construction de la connaissance. Enfin nous faisons l’hypothèse d’une interaction féconde entre didactique et histoire des sciences : si l’épistémologie est un des piliers de la didactique selon Astolfi, et si l’histoire des sciences est le laboratoire de l’épistémologie selon Canguilhem, alors l’histoire des sciences permet de faire réaliser aux enseignants la vie de laboratoire qu’ils n’ont jamais vécu étant restés sur les bancs, de l’école à l’université.
  • 11:00 – 11:45 Laurence Maurines (DidaSCO, Université Paris Sud)
    Introduire une réflexion épistémologique dans les cours de sciences du secondaire : les situations d’investigation documentaires à caractère historique.
    Si les programmes de physique et de chimie de l’enseignement secondaire recommandent l’introduction de l’histoire des sciences, ils laissent plus ou moins implicite l’enjeu d’apprentissage relatif à l’image de la nature des sciences et ne le concrétisent pas en termes d’objectifs et de contenus précis d’enseignement. Par ailleurs, les éléments historiques introduits dans les manuels d’enseignement renvoient une image réductrice de la nature des sciences et sont le plus souvent des moyens d’apprendre des savoirs scientifiques et non épistémologiques. La dimension épistémologique de l’apprentissage des sciences est à l’origine d’un courant de recherches désigné par l’acronyme NoS (Nature of Science) dans les pays anglo-saxons. Nous montrerons comment il est possible d’élaborer des situations d’enseignement de type « investigation documentaire » fondées sur l’histoire des sciences répondant à l’objectif général des programmes et transmettant une image plus authentique des sciences. Nous détaillerons les principales caractéristiques des ressources documentaires et des activités élaborées pour les élèves en nous fondant sur une idée de science ancrée dans les différents types d’études sur les sciences et en choisissant une entrée par les pratiques. Nous conclurons par les premiers retours d’enseignants et d’élèves.
  • 11:45 – 12:30 Danielle Fauque (GHDSO-EST, Université Paris Sud)
    Une expérience d’enseignement d’histoire de la chimie au plus près du cours de chimie en année post bac à l’ESCOM (2012-2016).
    Actuellement, une expérience d’enseignement de l’histoire des sciences chimiques est en cours à l’ESCOM (Compiègne) en première année post-bac (12 heures annuelles par élève). Il s’agit ici d’apporter des éléments de compréhension de certaines notions par l’histoire de la discipline. Après échanges avec les professeurs de chimie, j’ai choisi de suivre au plus près l’enseignement de chimie générale. C’est donc naturellement que l’atomistique y a trouvé sa place. La place du texte original est réduite (mais pas absente) au profit d’une discussion sur le contexte de tel ou tel aspect majeur de la discipline. Situer le savant et ses découvertes en son temps, tant par rapport à l’évolution de la discipline que par rapport au contexte social et politique dans lequel il vivait, a surpris les élèves. L’exposé précisera le contexte et l’évolution de l’enseignement dispensé à ces élèves se destinant à une carrière de chimiste, rapportera leurs réflexions et leurs attentes, et présentera entre autres une étude de cas sur le développement d’une séquence portant sur la construction du tableau périodique des éléments (1869) et ses conséquences, noeud important dans l’évolution de la chimie.


Déjeuner sur place

  • 14:00 – 14:45 Arnaud Mayrargue (CNRS, SPHERE) et Muriel Guedj (LIRDEF, Université Montpellier)
    Un concept difficile à maîtriser : l’énergie. Apport de l’éclairage historique.
    Le thème de l’énergie est présent tout au long de la scolarité, que ce soit en tant que première approche, idée, à l’école et au début du collège, ou en tant que véritable concept au lycée. Au‑delà de la compréhension du concept, ce sont ses utilisations concrètes qui sont proposées dans les programmes, accompagnées des méthodes, propriétés et raisonnements afférents. Sans oublier son importance, qu’il s’agisse des questions éminemment sociétales qui concernent le développement durable ou celles relatives à la production, conversion, économie d’énergie et les techniques qui leur sont associées. L’idée de conservation devient centrale au lycée, en particulier en classe de première S dans l’étude des réactions chimiques et nucléaires, alors même que sont débattues les questions liées à la dépense et l’économie de l’énergie. Concept protéiforme, l’énergie est difficile à enseigner. Nous voulons montrer que, dans cette complexité, l’histoire des sciences et, en particulier, l’utilisation de textes historiques, peut contribuer à l’élucidation du concept.
  • 14:45 – 15:30 Sylain Doussot (CREN, Université de Nantes)
    Problèmes scientifiques passés et présents dans l’enseignement : les apports de la didactique de l’histoire.
    Le regard de la didactique de l’histoire peut documenter la question de l’usage de textes scientifiques anciens dans l’enseignement des sciences (actuelles) sur deux plans complémentaires. D’une part, elle constitue une discipline de réflexion sur le travail avec des sources écrites dans l’apprentissage de savoirs sur le passé, qui est toujours un travail d’analogie entre passé et présent. Les savoirs scientifiques souffrent souvent d’une asymétrie qui tend à faire du texte de savoir ancien une erreur par rapport au savoir présent, qu’une historicisation peut combattre en restituant le document dans son contexte problématique. D’autre part, elle peut fournir un point de comparaison par l’usage que l’on peut faire en classe de documents anciens pour enseigner l’histoire en tant que pratique scientifique d’appréhension du passé, notamment sur des questions d’histoire culturelle dans lesquelles s’inscrit l’histoire des sciences. Ces deux perspectives sont explorées sur la base d’études empiriques réalisées dans un cadre théorique attentif aux problèmes épistémologiques.
  • 15:45 – 16:30 Alain Bernard (Centre Koyré, Université Paris Est-Créteil)
    Penser l’étude de textes anciens dans un contexte de formation d’enseignants, comme la construction d’un espace transitionnel.
    Dans certaines conditions, la lecture ou l’étude de sources anciennes dans un groupe de professionnels (enseignants ou autres) a valeur de rencontre pour les participants. Autrement dit, le contenu qui leur est proposé, fait (ou peut faire) l’objet d’une appropriation qui est elle‑même fonction de l’expérience –notamment personnelle et/ou professionnelle– des lecteurs. Dans les termes de la psychologie analytique propres à D. Winicott, l’expérience de lecture devient, ou plutôt peut devenir, le lieu de la construction d’un espace transitionnel, un espace de jeu. Les bases théoriques de cette lecture ont été esquissées par Christian Bonah et Jérôme Danet ; or le problème qu’ils ont ainsi posé me semble général et touche à des dispositifs d’étude collective de sources, à partir du moment où ils sont pensés pour atteindre le même genre d’effet. J’illustrerai cette généralisation en évoquant le travail au sein d’un groupe de travail récemment mis en place à l’IREM de Paris Nord. Je discuterai ensuite les implications de cette approche dans les termes qui nous proposés dans la journée d’étude : quels sont les formes et les dispositifs qui permettent d’atteindre cet effet ; à quelle condition(s) peut‑on espérer qu’il soit atteint ? Quels sont les buts d’un tel dispositif de lecture collective ? Enfin quels sont les moyens d’une telle approche ? C’est à cet endroit que je discuterai en particulier de l’épineuse question du choix des sources, des "bonnes" sources qui sont susceptibles de permettre la construction d’espaces transitionnels. Est-il possible de les caractériser, au‑delà des leçons d’expérience, certes toujours utiles et déterminantes dans la pratique, qui permettent aux formateurs d’identifier les "bons" textes, ceux "qui marchent" ? Cette question est bien sûr loin d’être simple, j’en proposerai une approche historique tirée de mes propres travaux sur les textes anciens, dont la facture emprunte certains traits à la rhétorique ancienne.
  • 16:30 DISCUSSION / DEBAT




Accès : Université Paris Diderot, bâtiment Halle aux farines, hall C, puis F, 5e étage, 16 rue Françoise Dolto, 75013 Paris
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Métro ligne 6 / Station : Quai de la Gare
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