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Résumé de thèse
THEMES DE RECHERCHE
Mon champ de recherche est ce qu’on appelle communément aujourd’hui «les ethnomathématiques». Ce mot a pris, depuis l’émergence de ce champ dans les années 70, plusieurs significations. Le sens que j’y mets dans mes recherches est celui d’un regard croisant les mathématiques et l’anthropologie, sur certaines pratiques existantes dans des sociétés traditionnelles. Plus précisément, si j’utilise la modélisation mathématique et ai recours à l’informatique, c’est dans un but précis : construire de nouvelles sources ethnographiques pouvant offrir aux anthropologues une nouvelle façon de questionner la façon dont les sociétés « habitent et expérimentent le monde » pour reprendre la formule de Philippe Descola.
ARTICLES
CURSUS
• 2005 : Agrégation de mathématiques
• 2006 : DEA de mathématiques, spécialité analyse fonctionnelle
• 2022 : Thèse de doctorat en Histoire&Philosophie des Sciences et des techniques : Une étude ethnomathématique du dessin sur le sable du Vanuatu. De l’ethnographie à la modélisation mathématique, regards croisés sur la pratique des Uli-Uli chez les Raga de Nord-Pentecôte.
RESUME DE THESE
Il existe dans les îles du centre du Vanuatu (anciennement Nouvelles-Hébrides), une pratique consistant à dessiner, à même le sol, des figures symétriques. Après avoir tracé une « grille » sur un sol recouvert de sable ou de cendre, les praticiens produisent une ligne à l’aide d’un doigt, qui ne se lève que très rarement pendant l’exécution du dessin et qui ne repasse pas continûment sur une partie ayant déjà été tracée. Une fois le dessin terminé, l’index est, dans un très grand nombre de cas, revenu au point de départ et dans la même direction. L’ensemble de ces caractéristiques rendent cette pratique d’autant plus contrainte que la plupart de ces « dessins sur le sable » possèdent généralement un ou plusieurs axes de symétrie.
Après un travail de relecture des premières ethnographies développé dans une première partie, cette thèse s’attache à introduire, dans un second temps, un modèle mathématique de la pratique de dessin sur le sable. Fondée sur une enquête réalisée entre 2016 et 2019 entre Port-Vila, l’île de Maewo et l’île de Pentecôte, la méthodologie retenue – à la frontière des mathématiques, de l’informatique et de l’anthropologie – a permis d’introduire deux concepts clés : le « groupe des mouvements », ainsi qu’un graphe étiqueté sur ce groupe nommé « graphe de modélisation » et noté Gmod. Ils fournissent un cadre mathématique rigoureux permettant de mettre au jour des algorithmes et des opérations de nature algébrique qui sous-tendent la création ou l’exécution de ces dessins.
Muni de ces outils conceptuels, la troisième partie de la thèse est consacrée à l’étude d’un corpus de dessins, collecté au nord-est de l’île de Pentecôte dans la société Raga où ils portent le nom de uli-uli . Cette partie prend comme fil directeur la pratique du dessin sur le sable chez les Raga et se donne pour ambition de mettre au jour les liens entre ces artéfacts, les relations qu’entretiennent les Raga avec leur environnement et leurs modes d’organisations sociales. Le modèle mathématique, et notamment le théorème de Veblen, qui assure l’existence d’une décomposition d’un graphe eulérien en une union de cycles d’arêtes disjointes, joue dans cette étude ethnomathématique un rôle prépondérant. Tout particulièrement, les dessins qui peuvent être décomposés comme des superpositions de cycles symétriques (appelés couches) pourraient être le reflet de la complexité des modes d’organisations sociales et des conceptions ontologiques du vivant des Raga.
Mots-clés : Ethnomathématiques, anthropologie, théorie des graphes, théorie des groupes, Vanuatu, île de Pentecôte.